Mon poème me découvre
Une écriture nouvelle s’ouvre
Difficulté première :
Comment me dire ou me dédire
Sans déguiser le message ?
Tomber les masques
Un visage me sauve
Deux visages m’effacent !
La sueur dans les yeux, je traverse
La syntaxe sans détour
Ce jeu m’éprouve
Ce jeu me prouve
Que je peux renaître
Sans forme, ni substance
En pointillé ou en trait plein
La magie de l’enfantement
M’étreint
Mon poème, me portera-t-il
A son terme et au mien !
*
Dans mon palais d'Air
Je brode les nuits et les jours
Je monte et descends
L'escalier du temps
En égrenant mon chapelet :
Il m'enchaîne
Ne m'enchaîne pas …
Soudain je trébuche
Le chapelet tombe
Dans les failles
De la conscience millénaire
Dans les crevasses
De l'esprit ancestral
Les papillons de mes songes
S'envolent sans moi
J'efface mon image
De tous les miroirs du palais
Je jette un regard inédit
Sur mon corps
Exhumant la trace des siècles
Sur ma poitrine tatouée
Hier encore
La trace pouvait ne pas exister
Toute chose peut être effacée
Dans sa totale concentration
C'est l'apprentissage
Incontournable
Des mères dignes de ce nom
L'éternel message
L'anti-message
Pourquoi ne pas en parler ?
Pourquoi en parler ?
Pour atteindre
L'irreproductibilité !
*
Une poignée d'air dans la main
Une larme suspendue au cil
Le visage en partance
Je disparais
Disparais encore
Qui m'a assaillie ?
Qui m'a fait fuir ?
J'espère qu'il ne frappera plus
A ma porte
Mon corps est mon vaisseau
Vers l'autre rive
Un corps sans corps
Malgré moi
Je nage dans une jarre
De souvenirs
Une furtive rafale la brise
Le maître de l'océan
M'accueille
M'invite au jamais vu ni bu
Par mes lèvres altérées
Il m'ouvre une parenthèse
Durant mon errance
Durant mon aimance
En douceur
Je capte son arôme léger
Je m'assoupie dans ses bras
Qui donnent sur le pays de la lune
Là où mes égales
Dont je simule la présence
Marchent pieds nus
Quand les anneaux se brisent
Quand le dernier reflet de vérité
S'éteint !
*
Mes pensées titubent
Dans la nudité de la nuit
Dénouerai-je les méandres
De mon alphabet
Avant que mes pas ne s'égarent
Entre deux langues !
Prête à en découdre
Je suis les battements de mes mots
Malgré leur dispersion en chemin
"Le maître de l'émotion"
Fait courir ses torrents antiques
Dans mon sang
Lui revient-il de me guider
Sans me demander pourquoi
Aujourd'hui la translation
M'est-elle trop amère ?
Arriverai-je à trouver l'issue
En traçant la médiatrice
Qui m'évitera de périr
D'avoir choisi une corde
Insonore
Pour faire écho à ma voix
Sur les murs de
La troisième oreille !
*
N'avons-nous pas semé
Des soleils
Au seuil de la saison
Sans figure ?
N'avons-nous pas planté
Des fleuves
Dans la terre dure ?
Les chardons remplacent
De jour en jour
Les germes de blé
La canne à sucre
Et les tournesols
Leurs épines sauvages
Serrent le chemin de lumière
A rompre l'horizon
A rompre la raison !"
A quelle heure la mutation
A-t-elle eu lieu ?
Comment est survenu
L'échange des Dieux ?
Nuage après nuage
Ils ont répudié
Nos fous et nos sages
Réduit au néant
Nos désirs et nos rêves
Les chardons
Ont tous le même visage
Emergeant de nos terres
A notre insu
Ils ont fait de nous des
ETRANGERS !
*
Sous les voiles transparents
Pliant et dépliant
Les méandres de mon esprit
Un poème naît !
L'appel à la vie
Coule dans son oreille
Il pousse un cri
L'ange de la nuit lui dit :
Suis la cadence de ton cœur !
En connais-tu la voie ?
Tu as le temps
Si tu t’égares
Je te tendrai la main
Si tu renonces
Tu renonces à ton commencement
Et au mien !
*
Me voici seule à seule
Avec la feuille blanche
Ma plume dans sa totale
Déroute
Place mon rêve entre tes mains
Paume après paume
Les aiguilles de ma boussole
Se tournent toutes vers toi
L’encre pleut goutte à goutte
Sur les pétales de tes draps
Pour restituer mon corps
En exil en toi
Tes bras me convient
A leur hospitalité
Au rebord de ma tresse dénouée
Les vers ont parlé
La trêve est accordée
Le temps de graver mon nom
Entre les plis de ton cœur
Mais qui serai-je
Après le furtif voyage ?
Je sais
Je ne reviendrai pas
Comme je suis partie
Discrète
Je te porterai en tatouage
Au revers de la main
Au risque de tomber dans
L’inévitable inclination pour
Ton retour
Comment guérirai-je
De ton inoubliable parfum ?
Quand cesserai-je de t’attendre
Toi
A qui je n’ai jamais fixé
Rendez-vous !