UNE GOUTTE D’EAU

Entre la marjolaine

Et le jasmin

Les lis et les iris

Le petit ruisseau

Poursuit son chemin

De son léger murmure

Tout le monde se moque

Personne n’en a cure

Et pourtant

Presque à contre-courant

Sa petite musique

Vient défier le temps

Sans cesse elle indique

Aux âmes de panser

Les plaies de l’époque

Il n’est jamais trop tard

Il n’est jamais trop tôt

Quand bien écouter

Le chant du ruisseau

Ne nous porte qu’à boire

Une seule goutte d’eau

HORMIS LE SILENCE

Pour entendre l’infini

Chaque être

Vit à son rythme

Ou vif ou alangui

Si les sons étaient fiables

Et les mots immuables

Le monde se viderait

De son mystère

L’oreille comme l’aile

De l’oiseau vient à se tendre

Elle ne perçoit pour bruit

Qu’un murmure du vent

Tout ce que l’on veut prendre

Depuis longtemps est pris

Si la montagne parlait

Elle ne saurait guère

Ce qu’elle devrait

Dire ou taire

La parole est un mur

De sable qui s’altère

Et rien sur cette terre

Jamais ne perdure

Hormis le silence

SOUS LES FEUILLAGES

Quand les heures s’écoulent

Et que les vagues roulent

Jusqu’à nos pieds au bord

De la plage on se dit

Que le temps n’envahit

Que les rides du vent

Que de colombes de nuit

Ont roucoulé avec lui

Dans l’embrasement

De l’envers du décor

Comme les roses cachées

Sous les feuillages

De peur d’être dénoncées

Par les anti-fleurissement

Les caravanes de l’amour

Se sont déjà éloignées

Des yeux des sentinelles

Des sournois et des censeurs

Mais les chiens aboient encore

C’est l’air léger de l’heure

Qui pour toujours demeure

Face aux cris de malheur

Qui vivent au-dehors

DES RIVAGES LOINTAINS

Des rivages lointains

Accourent des étoiles

De sable qui demain

Entre nos mains

Tremblantes

Mal assurées

D’autres diront fragiles

Se pétriront comme l’argile

Sous les doigts du potier

Certains manient

Le feu, l’eau et la terre

D’autres font danser

La couleur et la lumière

Chacun selon son souffle

Selon sa part de mystère

Nous en ferons des fleurs

Des dragons ou des anges

Des êtres animés

Soumis à nos humeurs

Ou des choses immobiles

À jamais figées

Sans négliger leur effet

Sur la fougue intérieure

Ne dit-on pas

Que c’est l’œuvre

Qui choisit son concepteur !

LA TEMPÊTE DE L’ORGUEIL

Quand la tempête

De l’orgueil frappe

L’équilibre

Le plus immuable

Est atteint

On le voit qui

Chavire et chancelle

Comme tremble la flamme

Que l’on croit éternelle

L’ego roule ses flots

Recouvrant le lopin

De discernement

Que possède l’humain

Et la faible lumière

Fragile

Et si fière

Qui animait sa vie

Avec force et vigueur

Lentement se meurt

Et puis s’éteint